Bi’Causerie – « La Parade », film de Srđan Dragojević

Lundi 25 février, soir d’hiver, pluvieux et frisquet.

Pour la première Bi’Causerie de la nouvelle mandature, et sachant que celle initialement prévue avec les « Oubliés de la Mémoire », est décalée d’un mois, idée de génie, un cinéma, cela fait longtemps, depuis le plein été, qu’on n’a rien proposé.

Certes, on s’y prend un peu tard… Pas énormément de choix, un seul film le lundi mais à 21h au lieu de 20h, heure immuable de Bi’Causerie. Rapide validation, OK, on lance.

Seuls trois Bi’Causienne et Bi’Causiens rescapés pour aller voir « La Parade », film de Srđan Dragojević, réalisateur serbe, dont l’affiche a marqué les esprits : en premier plan, vus de derrière, des crânes rasés dont un avec la croix celtique (pardon pour cette usurpation dont nos ami-e-s chrétien-ne-s breton-ne-s se passeraient bien).

Critiques et réactions en ligne en général favorables, voire enthousiastes.

Et méritées. Un film tout à tour fin, drôle, exagéré, tendre, poignant, avec des personnages hauts en couleur, irritants et complices, égoïstes et partageurs…
Qui peut imaginer ces scènes dans une improbable mini rose, avec 5 malabars dont 4 anciens combattants des guerres atroces de l’ex-Yougoslavie, hier ennemis, et là improbablement embarqués dans une cause à soutenir et protéger… une cause qui nous est chère, la « Parade » », la « « Pride » » à Belgrade, menacée par des hordes
racistes et homophobes ?

De ce mélange détonnant, sort petit à petit un espoir grandissant, celui qui nous fait vibrer par-delà les frontières, car les causes nous sont communes. Oui, la parade aura lieu, mais à quel prix : une scène de combat de rue, même pas, de cour à 1 contre 10, qui amusera l’un, fera vibrer l’autre ou indisposera le troisième, à la limite du malaise. Au prix aussi d’un crâne brisé, d’une vie arrêtée, sur les marches d’un escalier descendant, sans doute aux caves. Le principal organisateur et porte-parole, celui qui, à un moment de lassitude, voulait tout lâcher pour émigrer vers des cieux moins hostiles, ne verra pas la vraie marche l’année suivante, mais il la fera dans son urne, serrée contre la poitrine de son ami resté seul, mais non, pas si
seul, puisque les autres et en particulier les anciens combattants -auparavant « anti-pédés »-, sont là, et bien d’autres.

Comment ne pas penser à cette Bi’Causerie où nous avons reçu un ami d’Amnesty International, qui nous racontait entre autres comment il avait fait partie de la délégation plus qu’européenne qui a permis de protéger la marche des fiertés à Riga et d’imposer à la police qu’elle contienne les fachos pourtant, là aussi, numériquement plus importants ?

Et puis, comme ce beau film passait à La Clé, cinéma d’Art et d’essai du Quartier Latin parisien, comment ne pas faire le lien entre cette projection où une vie état volée sur les marches en contrebas, et la soirée du surlendemain où je me rendrai 2 jours après, pour une initiative relative à la manifestation de Charonne le 8 février 1962 où 9. personnes trouvèrent, dans un escalier d’entrée de métro, la mort suite aux violences policières ?

Les droits ne sont jamais acquis ni concédés. Ils sont conquis, préservés, approfondis. La discrimination, l’inégalité, de quelque nature qu’elles soient, ne sont pas acceptables. Comment les bisexuelles et bisexuels, si souvent raillés, méprisés, voire agressés, pourraient en douter ?

Si vous ne l’avez fait, courez voir La Parade, guettez la parution du DVD, faites-le connaître autour de vous. Merci pour elles et eux, merci pour nous tous.

Vincent

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