BICAUSERIE – CHANTEURS LGBT DES ANNEES 30 AUX ANNES 60
23/11/2015
CENTRE LGBT
Conférence chantée animée par Sébastien et le chanteur Jann Halexander
[Retranscription]
Avant d’aller plus loin, c’est un exposé synthétique. On ne peut pas parler de tous les chanteurs, toutes les chansons LGBT, il y a forcément des oublis, il faudra nous pardonner pour cela. Cette bi’causerie est animée par Sébastien et moi. Je tiens à préciser que nous avons sollicité plusieurs artistes, y compris des femmes, nous n’avons pas eu de réponse. Enfin, il s’agit d’évoquer des faits, des figures, une époque, il ne s’agit pas de porter un jugement sur cette époque et ses acteurs.
Il a été rappelé de façon fort judicieuse par les médias que ce qui a été touché vendredi dernier aussi, c’était des milieux progressistes, ouverts, , pas forcément, pas strictement de gauches mais ouverts à la mixité, à la pluralité, à l’échange de cultures. C’est aussi une certaine idée de la France, qui a su s’affirmer sur la scène internationale à travers sa littérature, ses penseurs, ses peintres, ses philosophes mais aussi ses chanteurs.
C’est l’occasion de remonter un peu le fil de l’histoire et d’aller jusqu’aux années 30 et d’aborder la question de la place des artistes LGBT, chanteurs, compositeurs, interprètes, des années 30, peu avant la seconde guerre mondiale, à la fin des années 60, qui marque une nouvelle époque, l’époque post mai 68.
La chanson a l’avantage d’être un medium populaire et à ce titre il représente les courants, les pensées, les tensions qui traversent la société. La chanson française a ce truc particulier, c’est qu’elle n’est pas valorisée par les classes possédantes au même titre que les autres arts. Elle est trop sulfureuse : les paroles ont souvent des sous-entendus grivois et parfois aussi dramatiques. Des femmes souvent seules sur scènes chantent des histoire de maris infidèles, de marins qui ne reviennent pas, de mamans qui partent trop tôt, c’est l’amour, la mort, la mer, la pauvreté, les voyages sans retours. Elles mettent en valeur le prolétariat, elles mettent en valeurs les marginaux. La chanson n’est pas considérée suffisamment noble par l’élite française. Mais elle fascine, et elle fascine au-delà des frontières. Et c’est une tendance lourde.
Il y a l’ivresse des années 20, 30 en France. Les années 20, ce sont les années folles. La crise de 1929 aurait pu sonner le glas : l’Olympia ferme, suivi du Moulin Rouge. Mais la Chanson finalement est peu impactée, le monde de la chanson reste vivant. La crise montre en fait que c’était surtout un public de haut standing qui fréquentait les opéras, les music-halls, les dancings. Cette bourgeoisie perd beaucoup d’argent, a le moral en baisse. Mais les petites gens sont plutôt épargnés. Ils n’avaient pas grand chose : ils ne perdent pas grand chose. Ce sont eux qui font la vitalité des petits cabarets, des bals populaires, ce sont eux qui vont faire émerger Maurice Chevalier, Charles Trenet. La chanson confirme son statut d’art de proximité et d’art populaire par excellence, et c’est durable.
Le compositeur Francis Poulenc, bisexuel selon certains biographes, homosexuel, selon d’autres était regardé un peu de travers par la bourgeoisie dont il était issu et par une certaine élite culturelle car il aimait comme il le disait lui-même s’encanailler à Paris, dans les quartiers un peu marginaux, se mélanger aux autres, c’était une forme de caméléon social, capable de passer d’une classe à l’autre. Et il aimait beaucoup la chanson, ce qui lui était reproché, c’est ce côté ‘populaire’ qui a fait que le milieu critique le surnommait ‘moine et voyou’. C’était un ami d’Edith Piaf et du poète juif homosexuel Max Jacob. Francis Poulenc s’est beaucoup inspiré de la chanson populaire pour ses mélodies françaises, c’est à dire, pour faire simple, des chansons à l’aspect assez lyrique. Hors cases, Poulenc est un peu partout, il est donc un peu nulle part. Les riches regardent les pauvres avec pas mal de mépris, ont une certaine idée de ce que doit être la culture, mais les pauvres ont aussi leurs préjugés, beaucoup considèrent que l’homosexualité n’est qu’un vice bourgeois. Mais curieusement, tant qu’un artiste homosexuel, bisexuel, reste dans une certaine forme d’ambiguïté, son travail peut être apprécié par les autres comme par les autres. La situation est peut-être plus aisée pour les femmes que pour les hommes.
C’est ce qui se passe avec Suzy Solidor, femme fatale, belle blonde venue de Bretagne, lesbienne, une des premières femmes qui ouvre un cabaret en 1933, rue Sainte-Anne, la’Vie Parisienne’, qui est un lieu également de rencontres homosexuelles et où chante un certain… Charles Trenet.
Il y a donc une communauté d’artistes qui se regroupe un peu en fonction de leurs orientations sexuelles. Mais cette communauté paradoxalement trouve des compromis avec une société qui dans sa majorité a du mal avec les différences. La communauté LGBT de l’époque ne parle pas du tout mariages, enfants, ce ne sont pas des idées répandues, elle compose tant bien que mal avec un monde hétérocentré. Mais c’est une communauté d’une créativité incroyable, capable d’audaces et qui influe sur la société française. C’est dans ce contexte que Suzy Solidor interprète une chanson d’amour considérée comme l’une des premières chansons d’amour lesbiennes, ‘Ouvre’, en 1934 (faire lire le texte).
Est-ce le conservatisme d’une société qui suscite cette audace, cette activité créatrice originale placée sous le sceau d’une certaine forme de résilience ? Possible. Il faut rappeler que ces artistes vivent passionnément, ils incarnent ce qu’ils chantent. Ils composent, ils interprètent, ils chantent, et ils sortent aussi dans les lieux en vues, ils se montrent, et ça va durer jusqu’en 1942. C’est à dire que même sous les débuts de l’occupation, les artistes homosexuels dans leur ensemble ne sont pas trop inquiétés. Ils continuent de créer, vivant de peu, brûlant la vie, et c’est même quelque chose qui leur sera reproché au lendemain de la seconde guerre mondiale et ça servira d’argument malsain à certains homophobes qui considèrent que l’inverti est un marginal qui ne pense qu’à s’amuser et n’a que peu de considérations patriotiques. Un cliché de Jean Cocteau buvant avec les Allemands va lui valoir des ennuis avec la résistance plus tard. A noter que le couple Jean Marais- Jean Cocteau n’a pas vraiment été inquiété sous l’occupation. On ne peut pas dire de même des artistes qui sont à la fois LGBT, un peu trop ‘résistants’ et parfois juifs.
C’est la loi du 6 août 1942 sur l’incitation à la débauche, qui va obliger les artistes lgbt à faire profil bas. Certains quittent Paris, qui était déjà l’épicentre culturel. Pour autant, la vie artistique pendant la seconde guerre mondiale n’est pas du tout réduite à néant. On va retenir ici deux chansons emblématiques de cette période.
LILI MARLEEN
LES CHEMINS DE L’AMOUR
A noter que ces chansons devenues des classiques plutôt populaires ont certes été composées, interprétées par des artistes de la communauté LGBT mais pour autant ne s’adressaient pas spécifiquement à la communauté LGBT. D’abord, parce que la communauté LGBT, si elle existait, n’était pas structurée de la même façon qu’aujourd’hui. Une chansonette homophobe pouvait amuser la galerie sans que ça émeuve grand monde, c’est beaucoup plus compliqué de nos jours. Un ou une artiste qui affirmait trop franchement des amours différentes n’était pas aidée par le milieu culturel dans son ensemble.
Toutefois, il faut noter que les deux chansons qui vont suivre, si elles n’incluent pas la thématique LGBT, néanmoins contiennent chacune une dose terrible de subversion. Le fait que des artistes LGBT les aient mis en valeur n’y est pas étranger.
‘Lili Marleen’ n’est pas une chanson heureuse. C’est un couple séparé par l’horreur de la guerre et qui peut-être ne se retrouvera jamais. Peut-être l’homme ou la femme mourront pendant la guerre. Et même si la guerre finit et qu’ils survivent, ils auront changé de vie. Ils ne se retrouveront pas. Il y a là une forme de désespoir terrible dans cette chanson allemande, qui n’était pas du tout du goût ni des Nazis, ni des Alliés. Or cette chanson a fait consensus dans les deux camps. Le texte date de 1915. La musique que nous connaissons date de 1938. La version française par Suzy Solidor, de 1941. Anecdote personnelle, c’était l’une des chansons préférées de ma grand-mère qui aimait la chanter quand je me mettais au piano, ça lui rappelait quelques souvenirs heureux de bals pendant la guerre à Saint-Nazaire, dans une vie terne rythmée par la peur, peur des Allemands, peur des bombardements.
‘Les chemins de l’amour’, de 1940, possède une double-lecture. La première lecture, c’est une promenade sentimentale placée sous le sceau de la nostalgie. Mais, et c’était un motif de jubilation pour tout un milieu culturel qui l’avait saisi, c’est en seconde lecture une chanson pleine d’allusion clairement sexuelles, c’est une chanson sur la jouissance, sur l’orgasme et au niveau du genre, assez indifférencié. La chanson, composée par Francis Poulenc, sur un texte de Jean Anouihl, reste dans les mémoires, contrairement à la pièce de théâtre dont elle est tirée, ‘Léocadia’.
La libération va être le coup fatal porté aux artistes lgbt pendant une bonne dizaine d’années. On assiste à un discours assez homophobe, du moins très hétérocentré, avec le rock qui débarque. La chanson rive gauche, qui se développe en contre réaction n’aborde pas ou peu le sujet. Mais deux femmes vont jouer une sorte de rôle déclencheur. La première est une femme auteur compositeur interprète. Elle est considérée par les spécialistes de la chanson comme la première ou la deuxième femme (après Mick Micheyl) à écrire et les musiques et les textes. Jusque là les femmes chantent, parfois à leurs dépens, ce qu’écrivent les hommes. Cette femme, c’est Nicole Louvier. Une française d’origine polonaise, juive, qui joue de la guitare, porte les cheveux courts, femme très élégante et à la voix sensuelle. Elle est la première femme à jouer s’accompagner à la guitare. L’un de ses titres ‘Qui me délivrera’ en 1953, sera interprété par Marlène Dietrich en 1955. Nicole Louvier fascine, surprend. Ses chansons s’adressent peu ou pas AUX hommes, les plus attentifs constatent qu’elle chante les femmes, l’univers des femmes, l’amitié féminine, l’amour féminin. Et elle dérange. Tout se passe comme si les décideurs du milieu musical qui lui avaient donné sa chance réalisent qu’ils n’ont pas de prise sur elle. Les années 50, c’est la France conservatrice. C’est le conservatisme d’une bourgeoisie classée à droite, voire ultra-droite mais aussi celui des banlieues rouges, communistes. Les marginalisés qui avaient pu trouver quelques échos dans le désordre des années 30 sont forcés au silence, d’ailleurs certains ont changé de métier, ont choisi des vies plus conventionnelles. Nicole Louvier est une épine. Alors, vite, les décideurs musicaux vont lui trouver une sorte de rivale, une sorte de pré-Sheila, un archétype de ‘bonne chanteuse française’ qui plait aux jeunes filles et à leurs parents, ce sera Marie-Josée Neuville et ses fameuses nattes, en 1955. Je parle des fameuses nattes car la maison de disque l’oblige, par contrat, à porter ses nattes. Ses ritournelles sont faciles, plus accessibles et elle paraît plus docile, contrairement à Nicole Louvier. Marie-José Neuville se sentira à l’étroit toutefois dans l’étiquette qu’on lui attribue. Elle chante deux chansons qui seront censurées, elle coupe ses nattes et le public ne la suit plus. Elle chante un peu au Maroc et au Gabon, mais tourne la page chanson après, autour de 1963. Elle sortira quand même un disque en 1980. Mais elle dira elle-même des années plus tard qu’elle n’était pas prête pour faire carrière. En 1963, Nicole Louvier fête ses 10 ans de carrière et donne un tour de chant à la télévision où elle pendant vingt minutes ses classiques. Mais c’est un peu le chant du cygne car entre temps, elle a sorti un roman ‘Qui qu’en grogne’, où elle raconte les émois amoureux entre filles dans un pensionnat et un autre roman qui critique le show-biz, intitulé ‘Les marchands’. Bref, elle cumule les ennemis et se détourne de la chanson. Elle va réaliser quelques émissions pour la radio, continuer d’écrire avant d’aller vivre dans un Kibboutz en Israël, elle y rejoint son amie. Elle décède en 2003. C’est un documentaire réalisé par la journaliste Hélène Hazera qui va la remettre un peu en lumière, la même année.
Incontestablement, Nicole Louvier aura ouvert une brèche. Anne Sylvestre elle-même dira plus tard dans des interviews que le fait d’avoir entendu une femme écrire des textes, chanter SES textes et s’accompagner avec une guitare, c’était possible. On ne se rend pas forcément compte à quel point le milieu artistique pouvait être machiste à cette époque. Et les femmes artistes qui franchissaient les obstacles étaient isolées les unes des autres, parfois mises en compétition. Petit aparté, tout ne va pour le mieux dans le meilleur des mondes en 2015, évidemment, de ce côté là.
Une autre femme jouera un rôle étonnant. Juliette Gréco, née en 1927, originaire de Montpellier, muse des philosophes, des penseurs, de Saint-Germain des Prés, de Sartre. Elle chante déshabillez-moi, sort avec un jazzman noir américain, Miles Davis, et n’hésite pas à porter un chapeau haut de forme pour parler des homosexuels à travers la chanson ‘Les Pingouins’. C’est une femme qui revendique la liberté, et suscite des réactions d’une extrême violence. On lui crache dessus dans la rue. Et elle ne s’assagit pas. Son aura de femme fatale et peut-être une habileté à composer avec le milieu du show-biz et avec les hommes qui le composent font qu’elle se maintient, même si paradoxalement, elle vend peu. Elle chante beaucoup, elle met en valeur des auteurs comme Gainsbourg. Elle interprète également ‘Un monsieur aimait un jeune homme’, écrit par Guy Béart.
Mais qu’il s’agisse de Juliette Gréco, femme hétérosexuelle libérée, qui fréquente les homosexuels ou de Nicole Louvier, chanteuse, romancière, lesbienne, on fait face là à des femmes qui ont une certaine forme d’endurance, une capacité à encaisser les coups, les humiliations. Beaucoup de femmes abandonnent très vite, passent à autre chose. Et parfois, c’est plus grave encore, dans le cas de Gribouille, lesbienne, au look de garçonne, amie avec Barbara, qui chantera quelques chansons et fera une overdose le 18 janvier 1968.
Suzy Solidor subit une interdiction provisoire d’exercer dans son cabaret au lendemain de la guerre. En effet pendant le conflit, elle a accueilli des officiers allemands dans son cabaret. Et puis c’est elle en France qui a chanté inlassablement, la première ‘Lili Marleen’ en français et ça passe mal. Du coup, elle cède son cabaret à une autre chanteuse lesbienne, décédée plus récemment, Colette Mars. Elle va s’installer aux Etats-Unis. Elle revient en France, ouvre un cabaret en 1954, puis en 1960, va s’installer à Cagnes sur Mer, où elle ouvre un nouveau cabaret puis un magasin d’antiquités. Mais elle ne chante déjà presque plus, ni sur scène, ni sur disque.
Oui mais alors et les hommes ? Charles Trenet a été un peu inquiété au lendemain de la libération. On lui reproche d’avoir chanté en Allemagne, aux côtés de Tino Rossi, pendant la guerre. Il va se mettre au vert, il va beaucoup chanter à l’étranger. Il revient en 1954, où les gens ne l’ont pas oublié et chante de beaux succès comme ‘La Mer’, ‘L’âme des poètes’, ‘Nationale 7’. La vague yéyé va ralentir sa carrière, comme elle va ralentir la carrière de beaucoup d’artistes. Mais les chanteurs LGBT se font encore plus rares que les femmes. Une certaine ambiguïté que l’on supporte déjà difficilement chez les femmes, on ne la tolère pas chez les hommes. Et s’il y a une France qui adore Trenet, une autre le considère mal, en raison de sa vie privée, un secret de polichinelle, et il faut attendre l’arrivée de Mitterand pour enfin qu’il reprenne sa place. Il n’a pas de chansons qui abordent de façon frontale la question LGBT.
Que ce soit chez les Yéyés ou dans la chanson Rive Gauche, il est de bon ton de se moquer des amours différentes…ou simplement de ne pas en parler. Jacques Brel trouve les homosexuels déprimants, il les caricature dans la chanson néanmoins drôle ‘Les bonbons’ et n’aimera d’ailleurs pas trop que David Bowie, ce chanteur ‘effeminé’, pour le citer, reprenne ‘Amsterdam’. D’ailleurs, pour lui, ‘Amsterdam’ ne parle pas de marins gays et ne supporte pas le malentendu réel à ce sujet. Béart chante qu’on est bien dans les bras du sexe opposé. Fernandel fait rire la france entière avec ‘On dit qu’il en est ‘. Attention, cette chanson est plus drôle que méchante, elle n’est pas moraliste, une fois qu’on connaît le texte, avec le recul, on peut en rire. A part cette chanson, on n’a pas de traces claires sur ce que pensait vraiment Fernandel de l’homosexualité.
Léo Ferré a publié un poème assez homophobe, ‘Tante’, en 1956, dans le recueil Poètes vos papiers. Mais il évolue sur la question au détour d’une interview avec un journaliste espagnol passionné de musique francophone dans les années 70, il n’apprécie pas qu’on se moque d’eux. L’évolution est donc possible. Brassens n’a pas de chansons purement homophobes mais il les caricature, c’est toujours l’archétype du mec effeminé, pédéraste, comme dans les ‘Trompettes de la Renommée’. Grosso modo, la chanson à texte accorde peu de place à l’homosexualité et en général, quand elle en parle, c’est pour évoquer un vice, un comportement un peu grotesque.
Mais il y a quand même un chanteur qui va oser prendre le sujet à bras le corps et au sérieux : c’est Jean-Claude Pascal, avec ‘Nous les amoureux’. Une chanson écrite par maurice Vidalin et composée par Jacques Datin. C’est avec cette chanson qu’il représente Le Luxembourg au concours de l’Eurovision le 18 mars 1961. Et il gagne. Au début le grand public ne se rend pas compte que c’est une chanson qui dénonce la répression des amours homosexelles. Elle a propulsé Jean-Claude Pascal au devant de la scène. Il est élu pendant de longues années homme le plus élégant de France. Il meurt en 1992, célibataire, sans enfants, on lui suppose des relations homosexuelles. ‘Nous les amoureux’ a été un immense succès en 1961, mais Jean-Claude Pascal est isolé. On peut noter également Marcel Mouloudji, hétérosexuel mais qui a fréquenté tout un milieu artistique marginal très jeune, très tôt et qui a chanté des textes de Jean Genet.
Il faudra attendre un peu plus de 10 ans entre ‘Nous les Amoureux’ et une chanson qui va beaucoup changer de choses, qui va annoncer des temps nouveaux, dans la perception de l’homosexualité : ‘Comme ils disent’ d’Aznavour, en 1972. Un immense succès qui montre bien d’ailleurs qu’une partie de la société est prête à l’entendre. Un texte écrit, composé par Aznavour. Un hommage du chanteur à son chauffeur et décorateur, Androuchka. Evidemment mai 68 est passé par là – pour exemple, ‘Comprend qui peu’ de Boby Lapointe, interprété en 1969, paru sur un disque ode à la liberté en 1970. Mais alors, on entre de plein pied dans les années 70 et c’est une autre ère qui va s’ouvrir pour la Chanson et pour les chanteurs LGBT.
Nous invitons les internautes à se promener sur internet, qui regorge de pépite, ne serait-ce que pour découvrir les artistes évoqués. Vivre avec nos passés, ceux et celles qui nous ont précédé, sans forcément les sacraliser – ces artistes ne le demandaient pas- et vivre avec le présent, peut-être préparer l’avenir, faire en sorte que la parole des chanteurs et chanteuses de maintenant, quelque soit leur notoriété, ne soit pas trop vite oubliée.
Jann Halexander, chanteur, conférencier*
Titres chantés : Lili Marleen / Les Chemins de l’Amour
Textes lus : Bourrée de Complexes (Boris Vian), Ouvre (Suzy Solidor)
Vous pouvez retrouver la retranscription d’une masterclass donnée par Jann Halexander le 5 novembre 2013 à l’Université Michel de Montaigne Bordeaux 3, devant les étudiants de la Licence Chanson d’Expression Française sur le lien suivant, au sujet de l’Inspiration : http://jannhalexander.blogspot.fr/2013/11/presentation-masterclass-du-chanteur.html#gpluscomments