
Compte rendu de la Bi’Causerie du 19/10/2003
Religions et bisexualité
Par Michel
Chez les peuples sédentaires des steppes et des forêts, les êtres à la fois femme et homme étaient, et sont encore, considérés comme habités par l’Esprit de la Nature et sont désignés pour devenir leurs chefs spirituels.
38 siècles avant notre ère, les religions androgynes naissent dans les civilisations agricoles, où la femme et l’homme ont des rôles équivalents. En Inde, la déesse Shakti et le dieu Shiva , en Égypte, la déesse Isis et le dieu Osiris, incarnent les principes féminin et masculin. En Crète, centre de la civilisation minoenne, le dieu Dionysos est désigné comme « homme-femme ». En Chine, s’épanouit le taoïsme, religion dans laquelle l’Esprit de la Nature est à la fois féminin (Yin) et masculin (Yang).
17 siècles avant notre ère, les nomades cavaliers venus du nord de la Mer Noire et chez lesquels la femme, du fait de sa moindre mobilité, est fatalement inférieure à l’homme, déferlent vers le sud et imposent leurs dieux masculins et guerriers. En Crète, la civilisation minoenne est détruite par les guerriers grecs, tandis que l’ Égypte agricole résiste à la tentative du pharaon Akhenaton d’imposer la prépondérance d’un dieu solaire ; la civilisation chinoise reste, quant à elle, à l’abri de ces invasions.
13 siècles avant notre ère, les étrangers prisonniers en Égypte surmontent leur humiliation en se donnant un dieu mâle sous la conduite de Moïse et, 6 siècles avant notre ère, le monothéisme mâle l’emporte dans le judaïsme où la femme est considérée comme impure. Au 1er siècle de notre ère, Saint-Paul, fondateur du christianisme, affirme la suprématie de l’homme sur la femme et exige de l’homme qu’il refoule sa féminité. Bientôt, la femme sera désignée comme une créature diabolique. Au 7ème siècle, l’Islam considère la femme comme un être inférieur qu’il faut protéger.
Cependant, au 3ème siècle de notre ère, un texte d’inspiration taoïste, l’Évangile selon Thomas, est transcrit en égyptien; il y est affirmé la nécessité, pour l’être humain, de faire « l’homme et la femme en un seul». Depuis, la pensée androgyne continue de survivre, représentée, dans le judaïsme, par la kabbale, dans le christianisme, par le catharisme malheureusement détruit par Saint-Louis au 13ème siècle, et, dans l’Islam, par le soufisme qui survit encore de nos jours.
Conclusion
La bisexualité et l’androgynie des civilisations primordiales furent affaiblies et amoindries par la violence des nomades guerriers, puis des religions monothéistes, qui imposèrent des valeurs prioritairement masculines.
Mais, « tout être bisexuel peut être considéré comme une émanation de la transcendance du dieu » et « le but vers lequel doit tendre l’espèce humaine est la réintégration progressive des sexes jusqu’à l’obtention de l’androgynie. L’être évolué tend vers la bisexualité. » (A. Daniélou, Shiva et Dionysos)