Compte rendu de la Bi’Causerie du 10/12/2001 – Militantisme et politiquement correct
Définitions :
- Politique : ce terme dérive de « polis », la cité (en grec) et concerne l’ordre de la cité, ses règles, son organisation.
- Politiquement correct : notion américaine au départ, qui vise la prise en compte d’un maximum de minorités au travers, notamment, de la parole publique (discours politiques, presse, spectacles…).
- Militant : terme issu du mot latin « miles » (soldat), qui suppose une connotation offensive et l’idée d’une cause ou d’un territoire à défendre.
Qu’est-ce que la cause bi ? Sa définition est trop légère.
Par exemple, quelles sont les positions de Bi’Cause sur :
- l’homoparentalité,
- la prévention SIDA,
- le féminisme? (etc.)
Il est nécessaire de préciser l’idéologie de l’association, sinon on se basera sur une sorte de politiquement correct en guise de pensée.
La question discutée ce soir : faut-il une idéologie?
Remarque: l’idéologie nuit à la qualité d’écoute afin d’imposer des idées, l’idéologie est réductrice.
Autre remarque : une personne se demande l’intérêt de se donner, à Bi’Cause, une position sur l’homoparentalité, qui concerne les homos (cette question a suscité une petite polémique, plusieurs personnes pensant, elles qu’il ne faut pas nier notre composante homosexuelle et que l’homoparentalité nous concerne aussi).
Notre position par rapport à la société est une affaire d’identité et non d’idéologie.
Il s’agit d’être large, de ne pas se scinder en clans, de représenter tout le monde tout en évitant le prosélytisme.
Il s’agit aussi d’adapter le discours sur la bisexualité en fonction de l’interlocuteur.
Faut-il donc faire une moyenne ou expliquer tous les cas particuliers ?
Certains pensent qu’il ne faut pas trop définir, afin de ne pas exclure, et que la bisexualité est, par définition, ouverte.
La communauté de Lazza del Vasto montre l’abus du politiquement correct.
(Note de l’animatrice : le terme « idéologie » est un peu fort, volontairement, les participants ont réagi avec véhémence ; mais nous aurions pu parler tout aussi bien de « pensée », de « principes » ou d »idées' »)
Principes écrits dans des textes de l’association :
Le manifeste bi que nous avons mis au point en janvier 2001 a été élaboré après des discussions générales, notre idéologie doit partir de la pensée des adhérents.
La « promotion de l’émergence d’une identité bisexuelle » est déjà dans nos statuts.
Une définition toute simple de la bisexualité : double attirance physique ou affective.
Avoir une position prudente et accentuer la visibilité et l’acceptation par les hétérosexuels stricts.
Chercher la visibilité, c’est militer.
Or à Bi’Cause, toute la part conviviale est bien menée.
Mais pour ce qui est des écrits : le manifeste contient des points à rediscuter. Par exemple que signifie « donner une image valorisante de la bisexualité » ?
Le sujet de la sexualité suscite des blocages à Bi’Cause, et est à articuler avec l’idée d’une image valorisante.
Il s’agit de donner une image valorisante de soi-même à soi-même, banaliser la sexualité.
On rappelle un incident arrivé lors du gueuloir bi : deux textes à contenu très sexuel ont été distribués par un membre du conseil d’administration en même temps que des plaquettes de présentation de l’association. Ces textes ont été retirés par un autre administrateur. Le problème a été discuté en conseil d’administration, mais revient dans notre Bi’Causerie : le contenu très explicitement sexuel (en relation avec le plaisir anal, en particulier) a-t-il dérangé en lui-même ? La réponse des personnes présentes au gueuloir est non, ce qui a choqué c’est la méthode (cette distribution sauvage, sans prévenir) ainsi que la confusion entre un texte très officiel et généraliste qui sert de vitrine à l’association, lors d’une soirée ouverte à un public très large, et un texte très personnel dont personne ne conteste l’intérêt.
En quoi la bisexualité (ou la sexualité) est-elle dévalorisée ?
Faut-il parler crûment de sexualité au risque de choquer les nouveaux venus et les pouvoirs publics, ou se censurer soi-même ? Ça dépend des moments et des publics visés.
C’est un problème général de communication : s’adapter au langage de l’autre pour retenir son attention sans le troubler outre-mesure.
Pour défendre une idée il faut qu’elle soit dure.
Par exemple, une personne affirme que les bisexuels sont deux fois plus portés que les autres à l’adultère.
Attention : ne pas prôner l’infidélité comme règle du jeu des bisexuels. (S’ensuit une discussion sur la fidélité : de l’importance de la fidélité de parole par rapport à la fidélité physique). Simplement revendiquer le droit à l’adultère, comme pour tout le monde.
Une autre question mérite d’être clarifiée : participer à des émissions de télévision / de radio, au risque de travestir sa parole (émissions où on a peu de temps pour parler, où tout est réduit à quelques points saillants anecdotiques et racoleurs) ?
Il s’agit d’utiliser les médias pour militer, pour défendre sa position.
De même, Bi’Cause est implicitement laïque, mais cela n’a jamais été discuté.
Peut-être certaines personnes se censurent-elles à Bi’Cause et se retiennent-elles de parler de leur foi, ce qui peut amener un sentiment d’exclusion.
Une remarque : les religions sont souvent un frein à l’acceptation de sa bisexualité. Les gens qui viennent à Bi’Cause sont souvent en difficulté avec leur identité, elles ne viennent pas pour parler de religion mais pour ce qui fait la spécificité de l’association: la bisexualité !
La discussion sur la religion a duré au moins un quart d’heure, notamment pour dire que Bi’Cause n »était pas le lieu d’en parler ».
(Note de l’animatrice : mon sentiment très personnel, d’après ces longs échanges, est qu’il faudra tout de même en reparler un jour ou l’autre !)
Il faudrait revenir au sujet: le militantisme.
Réponse d’un membre du conseil d’administration, qui s’occupe en particulier de préparer les actions de visibilité (participations à la Gay Pride, au tournoi de football Talons et Crampons, etc.) : militantisme ? Y en a pas ! très peu de Bi’Causiens se mobilisent pour tout ce qui est militant à proprement parler.
Tout de même, il y a plus de 80 adhérents, la lettre bimestrielle, mise en place il y a 6 mois environ permet de mieux souder les adhérents…
Il doit y avoir des personnes visibles pour entraîner des personnes qui ne militeront pas mais se reconnaîtront.
Un problème de l’association : nous sommes bien entre nous, mais nous avons peur de nous montrer.
Il s’agit de se sentir bien entre nous avant tout, parce que nous avons besoin de nous reconstruire, pas besoin de nous exposer.
Ce qui est représentatif, ce sont les échanges de mail via le Net : on découvre d’autres personnes concernées et ça fait du bien!
On se rend compte qu?il y a, concrètement, des bisexuels à travers la France. Avec des témoignages on peut militer aussi.
La Gay Pride n’est pas si représentative, mais c’est une occasion importante, et le risque personnel est minime.
Le plus dur, c’est d’assumer, en soi, sa bisexualité, après tout paraît plus facile.
Poster un Commentaire
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.